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Publicité : les annonceurs qui s’engagent contre le sexisme publicitaire
La publicité est-elle le parfait reflet de la société ? The good company et kantar insights ont récemment publié un baromètre inédit portant sur l’inclusion et la diversité dans la publicité en france. L’objectif est en effet de confronter la perception et les attentes du public à la réalité du contenu de la publicité. L’iscpa vous invite à faire le point dans cet article.
L’omniprésence du publisexisme dénoncé
Malgré de nombreuses évolutions, la publicité en France reste encore à ce jour marquée par le sexisme (on parle d’ailleurs de publisexisme). Communication & Entreprise, au travers de son réseau de femmes « Toutes Femmes, Toutes Communicantes », a d’ailleurs réalisé un spot sur les clichés sexistes qui témoigne parfaitement de la situation actuelle.
Positions lascives, corps dénudés (y compris pour vendre un carrelage), la femme reste encore hypersexualisée avec un rôle secondaire, loin de l’image leader de l’homme. Une publicité pour un club de sport illustre ce constat genré : une affiche pour les femmes (rose) partage le slogan « Summerbody toute l’année », tandis que l’équivalent pour homme prône « Oser le 42 km ». Et que dire des traditionnelles campagnes pour la fête des mères qui vantent les louanges des appareils électroménagers ou encore une publicité pour un adoucissant qui permettrait aux femmes de « révéler leur féminité »…
Pour reprendre Simone de Beauvoir, « nommer c’est dévoiler et dévoiler c’est agir », d’où l’importance de dénoncer le sexisme afin de pouvoir le combattre. Car même s’il est plus subtil que dans les années 50, il est encore aujourd’hui bien présent. Selon une enquête réalisée par l’Observatoire de la publicité sexiste, le secteur affiche une sexualisation exacerbée des corps féminins avec des injonctions portant sur la beauté (54 %), la jeunesse (47 %) et la minceur (42 %).
Des stéréotypes également mis en lumière par le 1er baromètre de référence sur la diversité dans la publicité en France réalisé par Kantar, qui donne l’exemple d’Uber qui présente ses chauffeurs : on voit sur une affiche une jeune femme avec un enfant, « Mariane, chauffeur avec Uber et maman avant tout », et une autre avec un jeune homme, « Fodhil, chauffeur Uber et jeune chef d’entreprise ». Autre exemple : une publicité de Center Parcs qui annonce sur une affiche « Quand j’serai grand, j’serai pompier. Le rêve ultime de tous les petits garçons devient réalité ! Ils sautent dans un camion de pompier, sirènes hurlantes. Les filles sont évidemment les bienvenues ». Et sur une autre affiche : « Quand j’serai grand, j’serai princesse & chevalier. Une aventure royale pour les garçons courageux et pour les gentilles petites filles ». Les clichés genrés semblent avoir la dent dure…
Résultat ? Selon le baromètre de Kantar, 43 % des interrogés ne se retrouvent pas dans les publicités ! Ils sont pourtant 72 % à estimer que montrer la diversité dans la publicité est « important, voire très important » et 78 % d’entre eux trouvent que les marques ont fait plus d’efforts au cours des dernières années (même si 69 % pensent que c’est surtout par opportunisme).
Et ce constat sur la diversité ne touche pas uniquement les femmes. Les hommes ne sont que 18 % à s’identifier dans les publicités et 48 % des 65 ans et plus se trouvent moins bien représentés dans leur diversité. Enfin, 9 % des Français seulement déclarent avoir vu une publicité mettant en avant une personne en situation de handicap (alors qu’on compte plus de 12 millions de personnes dans cette situation en France).
Les marques s’engagent pour lutter contre les stéréotypes dans la pub
Malgré l’omniprésence du sexisme dans la publicité, on assiste depuis les dernières années à une prise de conscience collective et des initiatives sont mises en place pour pallier cela. On peut à ce titre évoquer le programme FAIRe de l’Union des annonceurs (UDA) qui a pour objectif de lutter contre les stéréotypes dans la publicité.
Ce programme, qui est revu tous les 2 ans, regroupe aujourd’hui plus de 40 entreprises signataires autour de 15 engagements pour leurs publicités, à savoir :
- la représentation inclusive de la société ;
- l’environnement et représentation des comportements ;
- l’alignement avec les engagements RSE de l’entreprise ;
- la communication des engagements et transparence ;
- l’éducation à l’usage responsable ;
- les critères environnementaux et sociaux ;
- la production audiovisuelle raisonnée ;
- les impacts environnementaux et sociaux du numérique ;
- l’univers de diffusion des publicités ;
- la modalité de diffusion des publicités ;
- le recours aux influenceurs ;
- la prise en compte de l’ensemble de ses publics ;
- la gouvernance de la communication responsable ;
- les engagements environnementaux et sociaux des partenaires ;
- la relation commerciale équilibrée et constructive.
Quelques exemples de pubs engagées
Malgré le constat assez alarmant de ces rapports, il faut tout de même souligner que certaines marques n’hésitent pas à s’engager sur divers sujets, dont la lutte contre le sexisme.
#1 Gillette, pour mettre fin à la « masculinité toxique »
Sur fonds de #MeToo, Gillette a lancé il y a quelques années un spot pour inviter les hommes à s’interroger et à changer de comportement. La marque a d’ailleurs transformé à cette occasion son slogan historique (« The best a man can get », « La perfection au masculin »). Le spot montre des situations de harcèlement de rue, d’ados qui regardent à la télévision des femmes hypersexualisées ou encore de mansplaining, auxquelles les hommes répondent inlassablement : « Les hommes seront toujours des hommes ». La publicité met enfin en avant des hommes qui tentent de faire évoluer les mentalités. « La discussion est importante et en tant que société qui encourage les hommes à être à leur meilleur, nous nous sentions obligés d’en parler et d’agir. Nous avons regardé, réalistement, ce qui se passe aujourd’hui et avons pour objectif d’inspirer des changements ».
#2 Handsaway, un spot choc pour dénoncer les agressions sexuelles
Cette publicité de l’appli HandsAway, intitulée crûment « Bande de bites », commence par annoncer qu’elle a été réalisée à partir de vrais témoignages de femmes que l’on entend tout au long du spot. Elle met en scène trois sexes masculins qui se détachent de leur propriétaire pour partir « à la chasse » avant de se terminer par deux phrases chocs : « 82 % des Françaises ont subi le harcèlement de rue avant leurs 17 ans. Continuons à dénoncer les agissements de cette minorité d’hommes dont sont victimes une majorité de femmes ».
#3 Equal pay day, pour une égalité des salaires
L’association Equal Pay Day a lancé un spot pour dénoncer le fait que les femmes restent encore moins payées que les hommes. Ainsi, les femmes françaises travailleraient « gratuitement » à partir du 7 novembre à 16H34, tandis que les américaines devraient commencer à travailler à l’âge de 9 ans pour avoir un salaire équivalent à celui des hommes…
L’agence MortierBrigade a choisi de mettre en scène une fillette de 9 ans pour rédiger le discours du Donald Trump. Un choix judicieux car plusieurs études ont analysé le verbe du président qui aurait le même vocabulaire qu’un enfant de… 9 ans !
#4 Heineken, « les boissons n’ont pas de sexe »
Heineken a choisi Publicis pour sa campagne « Cheers to All », pour dénoncer les préjugés sexistes. On y découvre plusieurs scènes habituelles dans un bar où un serveur apporte à plusieurs couples des boissons. Il tend alors systématiquement la bière à l’homme et le cocktail à la femme. Les couples échangent alors les boissons et la marque termine en rappelant que « les boissons n’ont pas de sexe ».
#5 adidas et sandy baltimore pour lutter contre les préjugés du football féminin
Adidas a diffusé une vidéo avec Sandy Baltimore avec l’objectif de « mettre quelques coups de pied à des préjugés », notamment au niveau du foot féminin.
L’athlète montre à cette occasion toute l’étendue de son talent et de sa technique parfaite, l’idéal pour couper court aux provocations sexistes que l’on peut voir entre autres sur les réseaux sociaux. Adidas a pour cela spécialement fabriqué des ballons ornés de tweets provocateurs et ignorants. La marque réitère son engagement : « Impossible is Nothing ».
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